RESSEMBLANCES :
Dans cet article, nous vous
proposons de vous intéresser aux similitudes et aux différences existant
dans chacun des courants théoriques dont nous avons parlé dans nos publications
précédentes, à savoir le béhaviorisme et le constructivisme.
En ce qui concerne les ressemblances, nous pouvons
noter que les deux courants que nous traitons proposent un apprentissage
progressif. Le béhaviorisme fonctionne par "paliers";
c’est lors de l'acquisition d'un comportement ou à son retrait que l'apprenant
pourra accéder au palier suivant de son enseignement, quand
le constructivisme lui permet de progresser par étapes. D'après Piaget,
lorsque l'élève a atteint un certain niveau de développement, il va pouvoir
passer à l'étape qui suit dans son apprentissage. Ainsi, ces deux courants qui
offrent donc un découpage de
l'enseignement et une pédagogie progressive.
De plus, on constate que
l’ensemble de ces théories donnent à l’erreur une place importante
dans les apprentissages. On observe que l’inexactitude est constitutive de
l’éducation. Prenons l’exemple du béhaviorisme :
les erreurs sont considérées comme
des accidents, qui révèlent des sous-objectifs mal découpés, ou du moins
insuffisamment décomposés. Elles sont donc à considérer comme des moments clés
dans l’apprentissage de l’enfant. Dans le constructivisme, les erreurs
sont révélatrices de conceptions inappropriées
et inadéquates. Les essais/erreurs sont nécessaires dans
la construction du savoir. Les avantages de cette façon de voir les erreurs
permettent à l’enfant de donner du sens à son apprentissage car il est
confronté à un problème qu’il doit résoudre. De plus, les compréhensions initiales de
l'élève, qui étaient des conceptions inadéquates, ne risquent pas de
réapparaitre, car elles ont été soit supprimées soit reforgées. Ainsi, grâce à
ses essais et ses erreurs, l’enfant possède des savoirs et des connaissances
solides et durables, car il les a construit lui-même.
Pour étayer cette pensée, nous pouvons évoquer l'idée selon laquelle le béhaviorisme et le constructivisme sont des courants d’apprentissage et non d'enseignement. Une idée nouvelle mais tout aussi importante, est celle que ces deux courants ont chacun une influence sur l’environnement, bien qu’ils ne prennent pas en compte l’environnement social de l’élève.
Dans ces deux théories, pour
atteindre les différents paliers ou stades, l’apprenant est motivé par
objectifs. En effet, le fait de progresser permet d’atteindre certains
objectifs fixés, ce qui va le motiver à en atteindre encore davantage. Cela va
ainsi former un cercle vertueux d’apprentissage, dans lequel l’apprenant est
motivé par l’atteinte d’objectifs croissants, que ce soit lui-même qui les ai
définis ou l'adulte.
Ainsi, le béhaviorisme et le
constructivisme s’accordent sur un autre sujet : la progression, au rythme
de l’élève. Par cela, on entend que ces théories prennent en compte le rythme biologique de l’enfant.
Dans le constructivisme, Piaget a été le premier à parler de stades
de développement chez l’enfant, qui, selon lui, correspondrait à l’évolution
de la pensée et de l’intelligence de l’enfant. Il est donc tout à fait
compréhensible qu’il mette en lien les apprentissages avec les différents
stades. Dans le courant béhavioriste,
l’enseignant est attentif aux possibilités et à l’évolution
individuelle de chaque élève. Il propose des activités adaptées
aux besoins de l’enfant, pour le faire progresser. Ainsi, l’élève a une
progression propre à lui-même, propre à son rythme. Il est souvent en situation
de réussite car il suit son évolution, il est donc en mesure de réussir ce
qu’il entreprend, grâce à des objectifs précis
et des activités pensées soigneusement par l’enseignant.
Ces deux modèles d’apprentissage
sont fondés sur la répétition. Pour le béhaviorisme comme pour le constructivisme,
l’apprenant ne peut comprendre et intégrer les connaissances qu’en répétant les
mêmes expériences, et en réutilisant plusieurs fois les mêmes schémas pour les automatiser. On pourrait ouvrir sur
l’apprentissage distribué : pour apprendre vraiment, il faut apprendre
plusieurs fois, entrecoupé de période de repos.
Ensuite, nous pouvons également
constater que ces deux courants sont issus de la même conception de l’éducation
nouvelle, c’est-à-dire que ces courants mettent en lumière
la pédagogie active. Ils font en sorte que l’enfant soit actif dans ses
apprentissages : il doit être acteur de son éducation. Elles affirment que
c’est en agissant, en résolvant des
situations/problèmes que l’on apprend. L’apprenant doit donc être motivé et
constructif.
Enfin, pour conclure sur les
similitudes et les ressemblances de ces deux courants de pensée, nous pouvons
les relier avec les TICE. En effet, on remarque qu’il est possible d’inclure
des outils TIC sans être en contradiction avec les pédagogies de chaque modèle. Nous pourrions même ajouter que les outils TIC les valorisent et démontrent leur
utilité en les appliquant à une réalité sociale, à l’évolution de notre
société.
DIFFÉRENCES :
Si de nombreuses similitudes et
ressemblances entre ces deux courants ont pu être démontrées, il existe
cependant des différences importantes à noter. Nous pourrions commencer par
expliquer les deux visions bien différentes que possèdent ces théories concernant
les apprentissages. Ainsi, le béhaviorisme place les
apprentissages au cœur de son enseignement alors que pour le
constructivisme, cet apprentissage est centré sur l'élève. C’est
l'apprenant qui est au cœur de la construction de ses connaissances. Il
y a donc deux conceptions pédagogiques bien
différentes l’un de
l’autre. Elles divergent quant à la conception
de l'objectif de leur apprentissage. En effet, le béhaviorisme tend au
formatage d'un être par l'inculcation de comportements et par le retrait de
certains autres, alors que le constructivisme n'est pas dans cette
instrumentalisation de l'apprenant. Il vise à l’émancipation et à
l’autonomisation de l'individu.
Parmi les diversités de points de
vue, nous pouvons remarquer que le béhaviorisme
prône une progression suivie de très
près : l’apprenant est encadré stade
par stade, des parcours sont prédéfinis et l’élève doit passer par chaque
étape, la valider, pour pouvoir ensuite passer à l’étape suivante. A l’inverse,
le constructivisme encourage la liberté
de l’élève dans ses apprentissages : c’est à lui d’explorer le monde qui
l’entoure, découvrir les phénomènes qu’il observe et c’est à lui de construire
et complexifier sa pensée. En classe, l’enfant choisit les domaines qui
l’attirent et progresse à son rythme. L’adulte, ou l’enseignant en situation
scolaire, devient alors un guide qui suit de loin la progression de l’enfant.
Il n’a pour rôle que de le soutenir et l’encourager dans ses apprentissages.
Pour renforcer le
point précédent, il est nécessaire d’ajouter que les deux courants divergent
sur le type de progression à
proposer. Le béhaviorisme présente une évolution de l’enfant par paliers : ils correspondent donc aux
comportements attendus pour une certaine étape que l’enfant ne peut valider
qu’en montrant ce comportement, qu’en agissant et en prouvant à l’adulte qu’il
a acquis tel ou tel comportement. Le constructivisme, différemment,
propose une évolution en stades
d’apprentissages, sans nécessairement de production de comportements :
l’enfant apprend et progresse à son rythme.
Ces progrès cognitifs sans contrainte de temps varient suivant chaque enfant,
même si Piaget tend à montrer une progression similaire à tous les individus,
ce qui explique les différents stades atteints à des âges relativement précis.
Dans la continuité quant à la
différenciation des deux modèles, nous pouvons également noter que dans le
constructivisme, l’élève apprend en résolvant
des problèmes alors que dans le béhaviorisme, les apprentissages résultent d'une modification
des comportements. Cela revient à comprendre que le
constructivisme vise à l’autonomie de l’élève, les apprentissages ont pour but
de permettre à l’enfant de résoudre seul, par la suite, les problèmes auxquels
il est confronté, grâce à son expérience passée personnelle. Au contraire, le comportementalisme tend à vouloir inculquer à l’apprenant une expérience, sans
prendre en compte sa propre perception des choses et des évènements. Les
béhavioristes ont pour but de le conditionner, l’obliger à agir de telle façon
à un problème donné.
Pour compléter et étayer les
différences que nous retrouvons entre ces deux courants, nous pourrions noter
la différente façon de percevoir et de prendre en compte les conceptions
initiales des apprenants selon les courants théoriques. Par exemple, la prise
en compte des conceptions initiales de l’apprenant pose le contexte de chaque
théorie : Dans le béhaviorisme, Watson pense qu’il peut créer l’enfant
qu’il veut, peu importe son passé, ses conceptions initiales, et cela seulement
par l’éducation qu’il va lui apporter. Selon lui, on ne peut pas savoir ce qui
se passe dans la tête de l’enfant, il la compare à une « boite noire ». Or, dans le courant
constructiviste, on centre la connaissance sur l’enfant. On considère que
c’est l’apprenant qui va construire ses connaissances, et qu’il va pouvoir
faire cela seulement à travers ses propres représentations. Elles ne peuvent
donc pas être mises de côté mais elles vont être à la fois le point de départ, et le résultat de
l’apprentissage. Contrairement au béhaviorisme, le constructivisme pense que
chaque enfant construit la réalité, sa réalité, et l’interprète grâce à ses
perceptions et à ses expériences personnelles. Pour illustrer mes propos, voici
une citation de Bachelard, qui explique bien la manière de considérer les
conceptions initiales de l’apprenant : « Quel que soit son âge, l’esprit
n’est jamais vierge, table rase ou cire sans empreinte » (Bachelard, 1938).
Il est donc nécessaire, dans ce courant théorique, de prendre en compte
l’expérience de l’enfant pour construire un apprentissage qui a du sens pour
lui.
De même, nous pouvons observer
que le comportementalisme ne prend pas en compte les émotions des apprenants, ni ses
sentiments ni ses particulières envies. Une citation qui prouve ce point de vue
: « Confiez moi une douzaine d’enfants en bonne santé, bien constitués, (…)
et je vous garantis que quel que soit l’enfant que je prends je le ferai
devenir le spécialiste de mon choix » (Watson). En utilisant la formation «
stimili/réponse », Watson ne
prend pas en compte les perceptions uniques de chaque enfant, il va plutôt le
former, créer les comportements qu’il souhaite. Ainsi, par la seule
manipulation, on peut former des enfants à être, à devenir ce que l’on désire.
Au contraire, le constructivisme prend en compte chaque aspect qui
différencie les élèves entre eux, dont les émotions. Les chercheurs
constructivistes ont conscience que l’enfant n’est pas vierge de tout, il n’est
pas une table rase sans aucune conception initiale, et il faut donc prendre en
compte cela pour l’amener à une éducation complète. Dans cette théorie, les
émotions des enfants, tout autant que leurs perceptions et leurs expériences
passées sont au centre des apprentissages, et sont même essentielles pour
progresser.
Toujours dans le même ordre
d’idée, nous retrouvons dans le constructivisme, la volonté que ce soit
l’élève qui dirige son apprentissage. Or, dans le béhaviorisme, ce rôle est
joué par l’éducateur. De plus, le béhaviorisme s’attarde sur le comportement seul des élèves, alors que
le constructivisme s’intéresse à l’épanouissement
des élèves.
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